La Cigale accueillait de nouveau SUEDE jeudi dernier, suite à leur dernier passage en 2013. Pas d’artiste en première partie prévu sur cette tournée, mais un double set audacieux et contrasté…
En premier lieu, avec un peu de retard sur l’heure annoncée, les britanniques entament la présentation de leur dernier album « Night Thoughts« , sorti voici quelques jours. Si de nombreux fans semblent déjà connaître la plupart des morceaux, l’enthousiasme se révèle assez limité sur la durée de ce set. Car là où les premiers rangs n’apprécient guère, et de fait, la projection sur une immense toile tendue devant le groupe, l’ensemble de la fosse et les balcons pourtant joliment garnis ne génèrent que peu d’éclats de joie. Étrange et fascinant concept : le groupe en transparence n’est que peu visible, l’écran coupant toute circulation d’émotions entre la musique et son auditoire. La succession de séquences, cohérente, est projetée sur le déroulé linéaire de l’album. Le groupe ne s’accorde aucune respiration entre les morceaux, se claquant impeccablement sur les images. Mais voilà le film Night Thoughts, réalisé par l’excellent photographe Roger Sargent, est glauque, décrit la perte d’un enfant, évoque le suicide, les noyades, la déchéance quotidienne middle-class : la nausée est récurrente. Les titres, qu’ils soient poignants ou véritablement entraînants, ne parviennent guère à exalter une salle mi-fascinée, mi-plombée.
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Brett Anderson nous confiait il y a peu, lors d’un conférence de presse à Paris, qu’il n’était pas très enclin à la magie des concerts en tant que spectateur. Cela nous revient en tête de manière persistante alors que nous contemplons l’écran. Mais Brett s’avère ce soir schizophrénique, car l’énergie déployée par le groupe et lui en particulier, lors du deuxième set « Hits & Treats », se vit comme un monstrueux cataclysme de bonheur et de partage. Le choix de cette deuxième setlist best-of constitue un immense contrepoids à l’heure qui vient de s’écouler !
Brett saute du haut de ses retours comme un ado exalté, s’allonge à terre sur « So Young », explose en gouttelettes de sueur sur les premiers rangs… Il descend chanter parmi le public face à la scène, se donnant chemise ouverte : un amour sans limite déferle perpétuellement entre le groupe et son public.
Mat Osman et Richard Oakes sont quant à eux fascinants par leur calme et leur précision ; Simon Gilbert aux fûts et Neil Codling préposé aux claviers et guitare semblent absorbés, en retrait, les pieds touchant Terre.
Une tornade a déferlé sur la scène, résonnant toujours juste contre les murs de cette belle et chaleureuse Cigale. Brett Anderson se souvient de leur dernier passage dans cette salle lors du Festival des Inrocks en 2013, et souligne la qualité des conditions acoustiques avec une performance de « The Living Dead » dépouillée. Il apprécie en continu l’ardeur de l’audience, lui saute littéralement dessus…
Tout cela (13 titres) passe trop vite ; la formation quitte la scène sur l’hymne « Beautiful Ones »… pour revenir remercier la salle en français dans le texte : « Vous êtes trop gentils ! » et lui signifier qu’elle mérite amplement un petit rappel. Oakes prend sa Telecaster custom et enchaîne « New Generation » dont les notes nous colleront à la peau encore un beau moment…
Du trouble, de l’élégance, de l’audace, un triomphe.
Photos et texte : © erisxnyx pour STBC
Remerciements à Warner Music