Dix sept années se sont écoulées depuis leur dernière prestation parisienne ; ce soir c’est sans artifices ni introduction d’une première partie que THE AFGHAN WHIGS investit un Trabendo doucement rempli. Il est 20h45 lorsque résonnent les notes de « Parked Outside« , issues de leur dernier album et premier opus depuis 1998 « Do To The Beast » : la formation de Cincinnati entame son set avec confiance.
Les premiers applaudissements réchauffant à peine la salle, Greg Dulli se présente : « Bonsoir, we are the Canadian Whigs » ! Une note d’humour bien de chez eux qui éveille rapidement l’audience, et promet une humeur générale guillerette sur du bon gros son…
Dix minutes se trament à bon rythme, et un jeune homme au troisième rang a les mains sur ses oreilles et les yeux fermés. Un régisseur surgit depuis le fond de la scène, inquiet, muni de protections auditives : le spectateur amusé le remercie de ses pouces levés avec un sourire désarmant. Dulli en profite naturellement pour expliquer à la fosse qu’il aime que son public soit en conditions optimales : il promet à chacun la meilleure soirée de sa vie ! Attention au spoil, car ce qui pourrait chez n’importe quel groupe alt-rock des années 90 passer pour de l’arrogance, constitue ici une promesse bienveillante de plaisir partagé, sourires et connivence.
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Ce qui frappe le plus sur ce set d’une heure quarante ? Les interactions récurrentes : avec le public d’abord. Immanquablement soucieux de son auditoire, Dulli reconnait quelques fans, détermine la proportion de provinciaux et étrangers qui ont fait le déplacement (« Combien de Belges ? Combien d’Américains ?! »), n’hésitera pas à signer disques et setlists après le concert…
Et sur scène surtout. Une énergie palpable en émane et inonde la salle par vagues, et les quelques morceaux sensibles ne ralentissent le rythme que pour magnifier déhanchés spontanés et éclats d’une voix parfaite de bout en bout. Flanqués à gauche, le bassiste John Curley et son pote gratteux Jon Skibic se coordonnent et jouent au face-à-face comme des gamins, tandis que le rayonnant Patrick Keeler (également batteur des Raconteurs et des Greenhornes) bourrine ses fûts et attire les sourires de chacun comme des aimants. On assiste également à quelques poilades entre Rick Nelson (violoncelle/claviers/violon) et Dave Rosser (guitariste hésitant régulièrement entre chapeau et lunettes de soleil) ! Le régisseur console ultra expressif Ryan O’Hara se paiera même le luxe de rejoindre la scène sur « Lost In the Woods/Getting Better« , avec ses hanches sur ressort et sa Gibson deux fois plus grosse que lui…
L’assistance est aux anges entre les vieux tubes repris en cœur, les nouvelles compositions remarquables, et des titres élégamment empruntés à Fleetwood Mac, aux Doors et aux Beatles. Mais lorsque les sept comparses quittent la scène, c’est un tremblement de terre qui fait littéralement vibrer le Trabendo pour un rappel certes prévisible, néanmoins explosif.
Un « Summer’s Kiss » tout droit sorti de 1996, un clin d’œil aux Twilight Singers (side project de Greg Dulli, Dave Rosser et Rick Nelson ici présents) avec « Teenage Wristband« , et une reprise langoureuse du classique de Bobby Womack « Across 110th Street« , pour les paroles duquel Dulli a préparé une antisèche, constituent une bien brillante clôture. Promesse tenue !
Plus tard, près de la sortie, le frontman hilare et encore transpirant de bonheur révélera à quelques fans attentifs que son secret réside dans une hygiène de vie drastique : eau claire, thé au miel, piment de Cayenne pour les cordes vocales, et un pétard occasionnel dans le tour bus !
photo et texte : © erisxnyx